C'ÉTAIT HIER

LA VENTE ANNUELLE DES ÉCRIVAINS CATHOLIQUES À L'HÔTEL CONTINENTAL

Archives de l'INA (10 septembre 1949) : Le Salon à l'hôtel Continental avec DANIEL-ROPS et Paul CLAUDEL, devant lequel s'attarde un ecclésiastique, le cardinal RONCALLI, nonce à Paris et futur pape Jean XXIII.

https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/caf90005904/pactes-religieux

 

Archives de l'INA (23 novembre 1950) :

L'année suivante le Salon, toujours à l'hôtel Continental, avec séance de dédicace d'auteurs catholiques, dont Paul CLAUDEL, Maxime WEYGAND, Henri QUEFFELEC.

https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/caf88021817/vente-annuelle-des-ecrivains-catholiques-a-l-hotel-continental

HISTOIRE DES SALONS DES ÉCRIVAINS CATHOLIQUES

En 1938, le premier salon

 

   Le Salon des Écrivains catholiques que Monsieur le Maire Jean-Pierre Lecoq accueille à nouveau, dans sa belle mairie du 6e arrondissement, a une longue histoire.

   Né en 1904 de la Corporation des publicistes chrétiens fondée en 1886 par Victor de Marolles, le Syndicat des écrivains français se donnait, en 1915, un président, pour alléger la tâche de l’illustre René Bazin, président de la Corporation. Ce fut Paul Bourget. Lui succéda en 1936 Jacques Hérissay (ce dernier recevra en 1953 le Grand Prix Gobert 1953 de l’Académie française pour La Vie religieuse à Paris sous la Terreur). Pendant les vingt-sept années (1936-63)  du mandat de ce dernier, le nombre des  membres du Syndicat des écrivains va passer de 160 à 600.  En 1938,  Hérissay eut une heureuse initiative dont on voit encore  aujourd’hui, la fécondité, celle d’organiser la première Vente des Écrivains français, qui se déroula dans les salons du Figaro. La guerre empêcha la seconde. Mais le train était lancé…

 

De 1946 à 1968, le salon à l’Hôtel Continental

 

   De 1946 à 1976, la vente fut annuelle et sans interruption.
De 1946 à 1968, elle se tint à l’Hôtel Continental.  Celui-ci fut construit en 1878 par l’architecte Henri Blondel (1821-1897), gendre de Charles Garnier, l’auteur du Casino de Monte-Carlo et du Grand Opéra de Paris, sur l'emplacement de l'ancien ministère des Finances brûlé en 1871 pendant la Commune de Paris. Situé à l’angle de la rue de de Rivoli et de la rue de Castiglione, il donnait  à l’arrière rue Rouget de l’Isle où s’ouvraient de magnifiques salons. Ce fut l'un des plus luxueux hôtels parisiens de l'époque.

 

   Bénéficiant de ce cadre somptueux, la Vente des Écrivains catholiques (nouveau nom du syndicat en 1948) devint une institution et un des évènements littéraires de l’année. Les résultats financiers permirent d’alimenter une Caisse de secours en faveur des confrères en difficulté. Chaque année, plus de quatre-vingts écrivains y étaient présents et l’on voyait une foule élégante et généreuse se presser dans les salons de l’Hôtel Continental. Le Cardinal-archevêque de Paris, Mgr Feltin, comme le Nonce apostolique, Mgr Roncalli, ont souvent honoré la Vente de leur visite. On remarquait un comptoir des écrivains canadiens de langue française. Les veuves des grands disparus, Madame Charles Péguy, Madame Charles du Bos, tenaient leur place. En 1950, le meilleur accueil fut réservé à la tombola pour laquelle de nombreux lots de valeur avaient été envoyés par les éditeurs. En 1951, ce fut, auprès des quatre-vingt-dix écrivains et de leurs « vendeuses », un flot ininterrompu de visiteurs, dont plusieurs académiciens. La tombola fut magnifique. Des comptoirs d’emballage avaient été installés par les soins du Bon Marché, et ce fut très apprécié.

   Pour la Xe vente, le jeudi 2 décembre 1954 – cette année-là, Alain Peyrefitte fit son entrée au Syndicat – seize mille cartes d’invitation furent lancées. Cinq mille livres furent vendus. Une foule d’amis et de sympathisants, de personnes désireuses d’offrir un beau cadeau de Noël ou de bibliophiles amateurs d’autographes circulait dans les salons. En 1957 – année où Mauriac publia Le nœud de vipères – l’affluence fut telle qu’elle posa un problème ardu aux organisateurs: cent écrivains et deux cent vendeuses ! Si bien que l’année suivante – année de la mort de Pie XII et de l’avènement de Jean XXIII – l’Hôtel Continental mit à la disposition des écrivains, en plus de la grande salle du rez-de-chaussée et du salon d’entrée, son jardin d’hiver.

   En 1959 – année de la mort de l’abbé Loutil, célèbre curé de Saint-François de Sales à Paris, alias Pierre l’Ermite chroniqueur au journal La Croix pendant 70 ans – se tint le jeudi 10 décembre, la XVe vente. Un an après, l’Hôtel Continental céda, en plus des comptoirs du rez-de-chaussée, son premier étage ! Cent vingt auteurs étaient inscrits, environ cinq mille personnes honorèrent le Salon. Il y avait un comptoir canadien et un comptoir belge. Une nouveauté fut particulièrement appréciée : la présence de dessinateurs et de peintres de Pax romana qui ajoutaient aux dédicaces des auteurs un dessin ou une aquarelle de leur composition. La tombola traditionnelle eut son succès habituel. En 1961 – année de l’Histoire sainte de mes filleuls de Daniel-Rops – cent auteurs et vingt dessinateurs et peintres furent présents. En 1963 – année de la mort de Jean XXIII et de l’élection de Paul VI– pour la vente du mercredi 4 décembre, cent huit écrivains étaient inscrits. Plus de dix-neuf mille invitations avaient été lancées. Une nouveauté : la liste des participants figurait sur le carton d’invitation.

   Après vingt-sept années de présidence (1936-1963) Jacques Hérissay se retira. Son successeur fut Abel Moreau. Le mercredi 2 décembre 1964, ce fut un grand succès pour la XXe vente. L’année suivante vit la mort de Daniel-Rops. En 1967, la vente fut gênée par une panne d’électricité fort inopportune ! Quelque cent écrivains étaient présents, parmi lesquels… Minou Drouet, jeune poétesse de vingt ans.

 

 

Le salon de 1968 a 1985

 

   En 1968, l’Hôtel Continental était livré à la pioche des démolisseurs. La vente des Écrivains catholiques fut organisée à la Maison de la chimie, 28 rue Saint-Dominique, Paris 7e, comme les quatre années suivantes - en 1971, Geneviève Duhamelet fut élue à la présidence à la suite d’Abel Moreau.

   En 1973, la vente se tint dans les locaux du collège Stanislas, 22 rue Notre-Dame des Champs, avec soixante-dix exposants.

   En décembre 1974, la XXXe vente se déroula pour la première fois dans le cadre somptueux des salons de Jours de France au Rond-Point des Champs-Elysées, grâce à la générosité du Général de Bénouville. De même en 1975 et 1976. Mais en 1977, on dut renoncer à la vente annuelle traditionnelle, faute de bonnes volontés pour l’organiser, de même en 1978.

   En 1979 Maurice Schumann devint président. Un nouveau nom fut donné au Syndicat, celui d’Association des Ecrivains catholiques. La vente du 21 novembre 1979 se déroula de nouveau dans les salons de Jours de France et rencontra un immense succès. La Maréchale Leclerc de Hautecloque et le Cardinal Marty firent une longue visite. Les ventes se succédèrent ensuite en février 1981, 1982 et 1983, mais il y eut un arrêt en 1984, les Écrivains catholiques s’étant mobilisés pour l’organisation d’un colloque qui se déroula à l’Institut catholique le 1er décembre 1984 sur le thème « Bonheur et permissivité », et en 1985. Le Syndicat des Écrivains comptait désormais 385 écrivains.

 

Le salon à la Mairie du VIe

 

   Grâce à l’obligeance de son maire M. Pierre Bas, c’est désormais là qu’il aura lieu, à une exception près.

   La Vente obtint un plein succès, comme en 1987 et en 1989, et comme en 1990 pour la XLe Vente. De même en 1992, et pourtant le pire était à craindre en raison d’une grève des transports et de l’importante manifestation d’agriculteurs  qui avait lieu autour de l’Assemblée nationale.

   Et voici vingt ans, le mercredi 7 décembre 1994, M. Jean-Pierre Lecoq, nouveau maire du VIe arrondissement, accueillait, à la suite de son prédécesseur François Collet, la Vente des Écrivains catholiques qui se déployait ainsi pour la sixième fois dans la Mairie de la place Saint-Sulpice. Celle-ci  rassembla soixante-dix écrivains, sur les 350 membres alors inscrits ; de même en 1996. En l’année 1998 – Maurice Schumann mourut le 9 février, Isabelle Mourral fut élue présidente de l’Association –. En l’an 2000, la Vente eut lieu le 15 mars : c’était la XLVe.  En 2001, pour la dixième vente à la Mairie du 6e, un nouveau nom lui fut donné : Vente-dédicace des écrivains catholiques.

   Deux ans après, petit intermède, la Vente-dédicace se tint, le samedi 15 mars 2003, dans les locaux de l’École Bossuet, dirigée par le P. Armogathe 51 rue Madame, Paris 6e. Daniel Raffard de Brienne remplaça Madame Mourral à la présidence.

 

   En 2004, retour à la Mairie du 6e ;  depuis lors, la Vente-dédicace se fit de nouveau annuelle. En 2006, année marquée par l’élection d’un nouveau président Claude Paulot, une action importante de communication fut menée et un nouveau nom fut donné à la Vente-dédicace : Salon des Écrivains catholiques. Le 21 novembre 2007, la grève des transports empêcha un tiers des écrivains inscrits de participer au Salon et diminua les visites. Devant la baisse de fréquentation du Salon, le mardi 14 octobre 2008, on se fixa au samedi, jour supposé plus favorable, pour les années suivantes. C’est ainsi qu’en 2009 le Salon eut lieu samedi 5 décembre, avec un meilleur résultat. Le samedi 4 décembre  2010, la neige tomba en abondance sur Paris… mais le succès fut quand même là. En 2011, on fit deux innovations : une conférence et une exposition accompagnèrent le Salon. Oeuvre  de notre archiviste Gérard Jubert, l'exposition, d'un grand intérêt et de haute qualité,  n'eut lieu  qu'à deux reprises (en 2011 "Nos illustres anciens" et en 2012 "Les écrivains catholiques bretons") en raison de la durée très réduite de son utilisation (seulement la demi-journée du Salon) sans rapport avec l'investissement personnel nécessité par le travail de préparation. En revanche, la conférence annuelle donnée  au cours de l'après-midi par un adhérent différent chaque année, en lien avec l'actualité, fut maintenue, et obtient toujours du succès.

 

Quel plaisir, pour les Écrivains catholiques et leurs amis, de bénéficier des lieux majestueux de la Mairie comme de l’agrément de sa situation sur la belle place Saint-Sulpice, au centre de laquelle s’élève la fontaine dite « des orateurs sacrés » ! Conçue par l’architecte Louis Visconti  d’origine italienne – son grand-père avait fondé le musée du Vatican – cette fontaine monumentale, érigée de 1842 à 1848 dans le style Renaissance, donne un cachet particulier à ce lieu de rencontre paisible, avec ses belles cascades joyeusement bruissantes, ses quatre lions magnifiques qui tiennent entre leurs pattes les armoiries de Paris, et ses hautes statues, plus grandes que nature, abritées dans les niches creusées sur chacune des faces de l’édifice qui s’élève à douze mètres, de quatre évêques, assis, qui furent des orateurs remarqués à l'époque de Louis XIV : Bossuet, Fénelon, Fléchier, Massillon, en quelque sorte de grands ancêtres des écrivains catholiques.

                                                           Chantal CREPEY